J'ai été récemment invitée à participer à une table ronde sur la mode éthique. Très vite, je me suis rendue compte que toute la discussion tournait autour du textile. On oublie facilement que la Mode, c'est aussi des accessoires et des bijoux. La part de la Bijouterie-joaillerie représentait 7,3% du marché de la mode en 2018 , son impact n'est donc pas négligeable.
Effectivement, il y a peu d'informations accessibles sur l'impact environnemental de la joaillerie et carrément rien ou presque concernant la bijouterie fantaisie, pourtant non négligeable quand on sait que le marché des bijoux fantaisie pèse 283 millions d'euros chaque année en France, soit près de 70 % des ventes de bijoux .
J'ai tenté d'y voir un peu plus clair, pour vous aider à comprendre pourquoi la démarche de BLISS est engagée et vous aider à exercer votre esprit critique , savoir ce que vous apporte cet objet versus ce qu’il représente, coûte, ou engendre.
Le flou autour de la Bijouterie Fantaisie
Les bijoux fantaisie sont une catégorie assez floue, qui regroupe l'ensemble des productions hors joaillerie, allant des bijoux de grande marque de luxe en métal argenté aux bracelets colorés des enseignes de fast fashion. Majoritairement en plastique, ils sont peu solides, vite démodés, et parfois toxiques pour l’environnement et pour la santé humaine (risque d’allergie, d’irritations de la peau…), ils finissent donc en général à la poubelle sans être recyclés.
Et lorsqu'il sont en métal, ce n'est pas beaucoup mieux, mais pour d'autres raisons...Le laiton en particulier, que l'on retrouve dans la majorité des bijoux fantaisie en métal, est un alliage de cuivre et de zinc, deux métaux particulièrement polluants à extraire. Leur exploitation participe à une érosion excessive (qui finit par boucher les rivières et tuer la faune et la flore présente dans le coin) et contamine grandement les cours d'eau proches en déversant des produits chimiques et de l'acide sulfurique nécessaires pour l'extraction des métaux. La plupart des métaux, dont le cuivre, ne se détruisent pas dans l'environnement et peuvent etre assimilés par les plantes et les animaux qui les ingèrent.
Une enquête réalisée en 2016 par la DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes), révélait que près d’un tiers des prélèvements sur des bijoux fantaisies en France contenaient des métaux lourds au-delà des limites réglementaires.Les teneurs en plomb, cadmium et nickel pouvaient notamment dépasser, de beaucoup, les prescriptions.
Et derrière le glam de la Joaillerie?
S’il est facile de l’ignorer, le secteur de la joaillerie est, avec celui de la mode, l’un des plus polluants qui soit. L’extraction de l'or possède un impact environnemental fort: extraire 3 grammes d’or pour faire une bague nécessite 1500litres d'eau et 100 grammes de cyanure, dont les composants se retrouvent ensuite dans les sols et les cours d’eau. Sans parler de la déforestation, causée en partie par les installations d’exploitations sans autorisation officielle. Les diamants, eux aussi, représentent une richesse convoitée mais polluante. En moyenne, on estime que 160kg de CO2 sont émis par carat de diamant taillé. C'est autant que l'impact environnemental de 2,5 smartphones ! Même la production de diamants de synthèse, que l’on pourrait croire plus vertueuse, engendre de fortes émissions de CO2.
En plus d’être catastrophiques pour la planète, les conditions d’extraction des matières premières sont également préoccupantes en matière de droits humains. Les conditions de travail des mineurs sont généralement catastrophiques (rémunération dérisoire, exploitation, risques sanitaires élevés, protection sociale inexistante…). D'après l'UNICEF, dans la cité minière de Bakwa Tshimuna, en République Démocratique du Congo, près de 4 enfants sur 10 âgés de 5 à 14 ans travaillent dans les mines, et ce malgré la loi congolaise qui n'autorise le travail qu'à partir de 16 ans. Ces enfants travaillent pour apporter un complément de revenu et aider leur famille, abandonnant l'école. Cependant pour leur travail, ces enfants ne gagnent en moyenne que deux dollars par jour.
le label Fairmined a été crée en 2004 et atteste de la provenance d’or produit par des mines autonomes, responsables, artisanales et à petite échelle. Il garantit un juste prix pour les minerais, une incitation financière pour couvrir les coûts de l’exploitation minière responsable, l’investissement dans le développement social et la protection de l’environnement. Le label interdit également de faire travailler des enfants dans les mines, diminue voir interdit l’usage des produits chimiques de type mercure.
Alors, si l’immense majorité des bijoux ne sont plus utilisés, pourquoi continuer à produire autant de nouvelles pièces ?
Richesse accumulée, transmise d'une génération à l'autre, la plupart des personnes ne souhaitent pas s'en séparer et les bijoux d'occasion ne représenteraient, par conséquent que 3% du marché du neuf, contre 40 à 50% pour les montres.
Bien qu'elle soit écologiquement importante, l'idée n'est pas de s'interdire la bijouterie contemporaine, mais de l'inscrire dans une démarche responsable. Il est bien sûr nécessaire de continuer à créer, à innover. Nous avons besoin de comtinuer a rêver à travers les bijoux. Mais ne peut-on pas penser que le marché pourrait conserver son dynamisme en se montrant plus vertueux ? La circularité ne pourrait-elle pas, elle aussi, générer des rendements ? En se focalisant, par exemple, sur la transformation, la rénovation ou encore la mise à taille des bijoux anciens, et permettre ainsi la réalisation de pièces de bijouterie à partir de matières non-toxiques, de préférence naturelle et/ou issus de composantes recyclées, le tout conçu au détour d’une filière de production transparente par des travailleurs justement rémunérés et aux droits fondamentaux respectées. Le Responsible Jewellery Council, apporte, depuis 2015, des solutions intéressantes et concrètes, et de nombreuses maisons de Joaillerie ont déjà intégré cette philosophie.
Plus que jamais, l'avenir de la Bijouterie-Joaillerie devra être circulaire et responsable. La démarche de BLISS s'inscrit pleinement dans cette logique et l'éco-conception a toujours été revendiquée dans mon travail. L'Upcycling est une 3e alternative , au croisement de la Joaillerie responsable et de la seconde main.
Une chose est sure, nous aurons toujours envie de bijoux, alors autant adapter notre philosophie pour la conserver créative et brillante .
Sources documentaires: Alternativeseconomiques, Fairmined, Responsible Jewellry Council , FashionNetWork, Challenges...